La clé des plans de sauvegarde est de connaitre le nombre et la répartition des individus des espèces en danger et des espèce invasives. Mais cela peut vite devenir compliqué pour des terrains inaccessibles. Les drones entrent en jeu pour rapporter des clichés de ces zones qui doivent être analysés. Ces derniers sont alors sujets au biais d’observation et erreurs d’identification…
Koalas (Phascolarctos cinereus)
(c) Wikimedia
L’équipe de Corcoran et al. (2019), travaillant sur la conservation des koalas, a voulu mettre au point une méthode de traitement automatique des images recueillies par les drones afin de supprimer ces biais et erreurs. Cela est d’autant plus nécessaire que cette espèce se dissimule facilement dans les forêts denses, les propriétés privés, inaccessibles ou demandant énormément de temps pour les observer. Des études de Dique et al. (2013) et de Hanger et al. (2017) ont d’ailleurs démontré que seulement 60 à 75% des koalas sont détectés par des observateurs expérimentés et 23% par des observateurs non expérimentés. Les mauvaises conditions de visibilité diminuent ces pourcentages.
Quelles images sont analysées ?
Pour les mammifères, ce sont des images thermiques qui sont utilisées, par télédétection aérienne via les drones (RPAS =Remotely Piloted Aircraft Systems). En effet, ces animaux présentent un gradient thermique assez grand nous permettant de les distinguer aisément du fond environnemental dans lequel ils vivent. Pour simplifier, les tâches de couleurs foncées (correspondant aux mammifères) se voient facilement.
Cependant l’imagerie thermique a été seulement testée sur des populations restreintes mais denses, dans des zones moins complexes que celles habitées par les koalas.
Il est donc nécessaire de définir une méthode se basant sur les RPAS pour les milieux difficiles et des espèce cryptiques, ne présentant pas une densité de population importante.
Quelle méthode d’analyse ?
L’équipe a mis au point un algorithme de traitement automatique des images prises par les drones, en combinant les résultats du traitement provenant de deux réseaux neuronaux profonds à convolution (= Deep Convolutional Neural Network ou DCNN), YOLO et Faster RPN. Ces réseaux permettent de réduire les images aux seules caractéristiques recherchées pour les identifier. Ils se basent sur l’organisation du cortex visuel des animaux et le traitement des images qu’ils captent de leurs environnements. Le résultat combiné a permis d’obtenir des cartes thermiques à partir des photographies des drones et une analyse précise pour localiser les koalas. Ils ont comparé les résultats à ceux obtenus par l’analyse manuelle, mais aussi aux données collectées par l’observation directe dans les mêmes conditions, afin de mettre en évidence le gain ou non de cette nouvelle approche. La compilation de données permet de rendre plus précis et performant cet algorithme. Les résultats sont flagrants, la détection présente un taux de précision de 49% par rapport aux analyses manuelles.
Le taux de détection est de 78% avec cette méthode. Ce taux est nettement inférieur avec les anciennes méthodes appliquées sur des populations comparables aux koalas. Pour les dugong ayant une faible densité de population comme les koalas, le taux est de 48.6% à 51.6%. Pour les ours, vivant dans des zones environnementales complexes, comme les koalas, le taux est de 60% .
Ajouté à cela, dans des environnements moins complexes et pour des populations d’espèces plus denses comme les grands mammifères africains, la détection par cette technique est aussi bonne voire meilleure. En effet, avec les anciennes méthodes le taux est de 43% contre 78%.
En conclusion, cette nouvelle méthode de traitement automatique de l’information pourrait être appliquée à d’autres espèces. Elle permettrait alors de consolider et de mettre en place des plans de conservation beaucoup plus efficaces et cohérents pour les espèces menacées, mais aussi pour gérer les espèces invasives.
E. Corcoran et al. (2019) Automated detection of koalas using low-level aerial surveillance and machine learning. Published in Nature – Scientific reports 9:3208. https://doi.org/10.1038/s41598-019-39917-5
Dique, D., Thompson, J., Preece, H., de Villiers, D. & Carrick, F. Dispersal patterns in a regional koala population in south‐east Queensland. Wildlife Research 30, 281–290 (2013)
Hanger et al. Final Technical Report: Moreton Bay Rail Koala Management Program. Queensland State Government, Department of Transport and Main Roads, Brisbane (2017).