Ce 8 janvier 2020, l’actualisation du bilan des pertes en faune s’alourdit d’un coup, après le communiqué de l’université de Sydney, par le professeur Chris Dickman.
En effet il y a quelques semaines, du fait des incendies qui touchent l’Australie, ce professeur estimait la perte en biomasse à 480 millions d’individus, ce qui était loin de la dévastation face à laquelle nous nous trouvons. Il estime à l’heure actuelle qu’il y a de 800 millions à un milliard d’animaux impactés par ces feux.
L’Australie, préfiguration des catastrophes écologiques futures
Koala, Australie
Wikimedia (c)
L’Australie connait le plus fort taux d’extinction en mammifères de ces dernières années, 34 espèces et sous-espèces natives se sont éteintes au cours de ces 200 dernières années.
Etant une île, elle est par définition isolée du continent et de superficie limitée, les espèces endémiques sont nombreuses et le risque de les voir disparaître à jamais est de plus en plus probable. Ici se joue en accéléré le phénomène que nous connaissons sous la terme de l’effet insulaire, où une population étant réduite en terme de population et de répartition géographique ne peut absorber de gros changement de son milieu de vie, et ne peut compenser une perte importante de sa population.
Pour le professeur Dickman, l’Australie pourrait être comparée au canari que les mineurs emmenaient dans les mines de charbon pour prévenir de la présence d’oxyde de carbone, gaz explosif et mortel à faible dose. Le canari subissait le premier les effets mortels de ce gaz, les hommes étaient ainsi alertés et évacuaient la mine. Ici l’Australie focalise de façon violente et importante les conséquences du changement climatique, l’extinction de nombreuses espèces se joue sous nos yeux.
Outre le nombre d’animaux morts directement par les flammes, il faut prendre en compte ceux qui ayant pu fuir ou s’abriter, reviennent dans un environnement qui ne contient plus les ressources nécessaires à leur survie. De plus, les animaux, ayant fuis et arrivant dans une aire où ils ne sont pas habituellement répartis, entrent en compétition avec les espèces déjà présentes et meurent sur un court terme, ou sont victimes de prédateurs introduits comme le chat sauvage, puisque les incendies touchent des réserves de faune sauvage qui étaient à l’abri de ces derniers.
A partir de quoi estimer la perte ?
L’estimation d’un milliard d’individus se base sur une estimation de 2007 du WWF concernant l’impact du défrichement par feux de brousse sur les grands mammifères, oiseaux et reptiles de l’Etat de Nouvelle-Galles du Sud, touchée actuellement par ces incendies. Cette estimation avait été réalisée car des feux de brousse se produisent assez régulièrement dans cette partie de l’Australie qu’ils soient spontanés ou provoqués par l’Homme. Ceux qui sévissent actuellement font suite à des mois de sécheresse intense et de températures records, comme le prévoyait le dernier rapport du GIEC. En effet, les phénomènes exceptionnels vont se multiplier à l’orée de l’augmentation continue des températures de la planète.
Nouvelle-Galles du Sud en rouge
Wikimedia (c)
Les auteurs de l’étude ont obtenus les estimations de densités des taxons qui les intéressaient et les ont multipliés par les zones de végétations défrichées. Pour les chiffres manquant, ils ont fait une extrapolation à partir de régions sensiblement similaires en Australie pour lesquelles les données de ces taxons étaient disponibles.
Ils ont considéré un taux de mortalité très prudent ce qui laisse supposer qu’à l’heure actuelle vue la violence des feux, le taux de mortalité est bien plus élevé.
Un autre point inquiétant est que cette estimation de mortalité ne prend pas en compte les insectes, amphibiens et autres invertébrés, ce qui élèverait la perte en biomasse à un chiffre glaçant de un million de milliard, selon Philippe Grandcolas et Jean-Lou Justine, du MNHN de Paris.
En effet les chiffres avancés, repris par nombre de médias ne se focalisent que sur un petit nombre d’espèces emblématiques et qui émeuvent le grand public. Il suffit de voir les campagnes de levées de fonds, ce sont les koalas les premiers mis sur le devant de la scène. (Effectivement un insecte ne soulève pas la même émotion… ^^ mais n’hésitez pas à contribuer à ces dons pour aider l’Australie, à l’image du Zoo de Beauval). Mais le million de milliard comprend, en plus des mammifères, reptiles et oiseaux, les invertébrés, insectes, parasites qui font pleinement partie de la biodiversité !
Kangourou, Australie
Pixabay (c)
L’ampleur de cette perte en espèces endémiques est sans précédent et n’augure rien de bon pour les autres parties du monde qui vont à leur tour être touchées par les conséquences du changement climatique si les politiques ne changent pas drastiquement.
On sonne le signal d’alarme depuis de nombreuses années, mais l’urgence et les catastrophes ne vont plus attendre le bon vouloir des politiques.
Sauver la biodiversité n’est plus un point dans une campagne politique ou une “idée d’écolo aimant les animaux” mais c’est une réalité absolue qui est le seul espoir de préserver notre vie sur la planète, au sens littéral du terme.
Campagne de levée de fonds du ZooParc de Beauval
http://www.beauvalnature.com/incendies-en-australie-appel-aux-dons
Article de l’Université de Sydney et du Professeur Chris Dickman
https://sydney.edu.au/news-opinion/news/2020/01/08/australian-bushfires-more-than-one-billion-animals-impacted.html
Article de Philippe Grandcolas et Jen-Lou Justine du MNHN de Paris
https://theconversation.com/fact-check-pas-500-millions-mais-un-million-de-milliards-danimaux-morts-en-australie-129677
[…] levée de fond en date, celle menée lors des incendies en Australie décimant des populations entières d’animaux sauvages. Le poids et l’impact du Zoo Parc […]