A l’image du célèbre parfum de Coco Chanel, les lémuriens sembleraient eux aussi avoir un parfum pour séduire ! Regarder à travers le prisme des primates, l’odorat ne nous apparaissait pas aussi important dans la communication entre individus chez les lémuriens et pourtant…
Maki catta (Lemur catta)
Wikipedia (c)
Il s’agit de la première étude sur les substances odorantes utilisées chez les primates pour la communication. On s’intéresse aux plus connus des lémuriens, le Lémur catta ou Maki catta (Lemur catta), primate arboricole, reconnaissable à sa longue queue annelée de noir et blanc. Il est emblématique de la faune de Madagascar.
Ces primates vivent en bande dominée par une femelle adulte, elle guide la troupe lors des déplacements et accède la première à la nourriture.
Les mâles marquent leur territoire grâce aux odeurs qu’ils laissent derrière eux et aussi pour démontrer leur rang lors d’affrontement entre mâles. En effet grâce aux glandes de leur poignet et poitrine, ils “imbibent” leur queue de ces odeurs et les projettent par un mouvement de balancement de leur queue vers leur adversaire. C’est alors le plus gêné qui s’en va.
Mais nous ne savions pas que la communication entre les individus pouvait aussi passer par les odeurs. Nous connaissons leur répertoire de vocalisations très riche, allant du miaulement au grognement, et leur communication visuelle Mais l’équipe de M. Shirasu a démontré que les odeurs servaient aussi dans le langage amoureux.
Ainsi les chercheurs ont pu isolé trois molécules odorantes (des aldéhydes) participant à l’attraction des femelles par les mâles, donc trois phéromones. Ces substances sont produites par les glandes anté-brachiales présentes sur les poignets des mâles. Le mâle frotte sa queue entre ses poignets et diffuse ainsi son parfum romantique sur son passage.
Lémuriens Maki catta et leurs glandes sécrétrices sur les poignets,
Production personnelle à partir d’une image Wikimedia (c)
Ils ont constaté que le taux de ces phéromones augmentait à mesure que le taux de testostérone augmentait, lors des périodes de reproduction. La présence plus importante de ces molécules odorantes modifiait le profil du parfum qui est habituellement lié aux mâles lémuriens, passant du cuivré-amer à fruité-floral avec une touche de poire. C’est donc ce parfum qui séduirait les femelles lémuriens, effet garantie pendant la saison de reproduction !
Des cotons imbibés d’un mélange des trois phéromones attirent les femelles en âge de se reproduire, mais laissent indifférentes les femelles plus âgées. De plus l’équipe a remarqué que les profils de parfum ne changeaient guère entre période de reproduction et de non reproduction pour les mâles âgés. Ce dernier point est logique aux vues de le relation qu’ils ont mis en évidence avec le taux de testostérone.
Ces résultats ouvrent un nouveau champs d’étude concernant la communication liée à l’odorat chez les primates, longtemps perçue comme secondaire. D’autres études sont néanmoins nécessaires pour définir si ces trois molécules peuvent réellement être appelées phéromones.
Shirasu et al., Key Male Glandular Odorants Attracting Female Ring-Tailed Lemurs, Current Biology (2020), https://doi.org/10.1016/j.cub.2020.03.037