La mégafaune marine, comment la préserver ?

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Les océans font face à leur plus grand défi, le changement climatique. Les espèces qui y vivent tentent, par tous les moyens, de s’adapter ou du moins de survivre. Nos efforts pour préserver les espèces fragiles, en voies d’extinction, sont un levier important pour la conservation de la biodiversité marine et mondiale.
Cependant il est assez difficile de quantifier et voir même de répertorier la mégafaune de nos océans. Cela est déjà compliqué sur terre, alors en mer l’enjeu est de taille, c’est le cas de le dire !


Une étude, qui paraîtra en octobre 2020 dans la revue Ecological Indicators, menée par l’équipe de I. Garcia-Baron et al. s’est penchée sur la question. Ils ont tenté de trouver les meilleurs indicateurs de définition des zones prioritaires à protéger, les zones de biodiversité de haute valeur (HVBA : high-value biodiversity area). Pour ce faire il faut, en premier lieu, définir les variables océaniques essentielles (EOV), ce sont les variables qui définissent l’environnement des espèces qui y vivent, on parle d’enveloppe environnementale des communautés

Données et site d’étude

Les chercheurs ont travaillé sur les données recueillies lors des campagnes océanographiques du programme PELACUS, du Centre Espagnol d’Océanographie, concernant les oiseaux marins et cétacés au nord et nord-ouest de l’Espagne, entre 2007 et 2016. Ces données font parties d’un jeu beaucoup plus grand, répertoriant la faune pélagique de l’océan Atlantique Nord, de l’Espagne jusqu’aux îles britanniques. On les retrouve également dans le dispositif d’observation Mégascope administré par l’UMS 3462 du MNHN.
L’échantillonnage à distance a permis d’analyser la détectabilité des espèces en fonction des conditions du milieu, couplés à des modélisation spatio-temporelles, justifiés par la quantité des données à disposition.

Résultats

L’équipe a mis en évidence, comme dans beaucoup d’études océanographiques, que l’abondance des espèces était impactée par la température de surface des eaux marines. Ils ajoutent à ces variables environnementales la distance entre les espèces et le talus continental marquant la fin du plateau continental (donc la topographie du fond océanique), et la concentration en chlorophylle-a.

Ce sont les températures de surface et la concentration en chlorophylle-a qui sont considérés comme les EOV dynamiques, de par leur importance prédicative comme indicateurs de densité élevée, façonnant l’enveloppe environnementale.

Les aires de haute valeur en termes de biodiversité ont été délimitées à l’ouest de l’Espagne et diminuant vers l’intérieur du Golfe de Gascogne, demeurant spatialement stables au cours des années d’études (2006-2017).

L’intérêt principal de définir des HBVA au niveau des communautés et non pas juste par rapport à une espèce isolée est de comprendre les mécanismes écologiques et océanographique sous-jacents de l’écosystème et moteurs de son évolution. On peut ainsi en déduire des modèles spatiaux-temporels des communautés biologiques, notamment constituées d’oiseaux marins et de cétacés (programme PELACUS).


Conclusion

Les données ainsi fournies par cette étude aideront à mettre en place des objectifs clairs de gestion des zones à protéger, en terme d’allocation de ressources (en clair, où protéger la Nature). Elle permet aussi de fournir des données spatio-temporelles fiables pour la planification marine (prévisions de la production de biomasse d’une année sur l’autre, par exemple comme nous l’avions vu dans un précédent article –Prévisions de variations inter-annuelles de la richesse marine-), au niveau des enjeux de conservation de la biodiversité marine.


I. García-Barón, M. B. Santos, C. Saavedra, A. Astarloa, J. Valeiras, S. G. Barcelona, M. Louzao. Essential ocean variables and high value biodiversity areas: Targets for the conservation of marine megafauna. Ecological Indicators. Volume 117, October 2020, 106504
DOI: https://doi.org/10.1016/j.ecolind.2020.106504