Il n’est plus à démontrer l’impact négatif de nos activités sur les communautés d’abeilles à travers le monde. L’écologie urbaine tente de pallier à ces déclins. Quels impacts ont les zones végétalisées de nos villes sur l’avenir des pollinisateurs ?
Le changement d’affectation des terres n’est pas un processus uniforme et les impacts varient selon l’espèce de pollinisateur étudié. Les terres agricoles ont-elles le même impact que l’urbanisation sur les abeilles, considérant que la diversité floristique diminue dans les deux cas?
En plus de la perte de diversité d’habitat par l’imperméabilisation des sols, l’urbanisation exacerbe la fragmentation de l’habitat par la construction de frontières artificielles à travers des zones de végétation autrefois contiguës. C’est donc logiquement que nous supposons que la quantité d’urbanisation dans le paysage environnant a largement contribué au déclin de l’abondance et de la diversité des abeilles locales. Cependant il faut noter que la présence majeure de canopée ne permet pas non plus une grande abondance d’abeilles, car les arbres bloquent la lumière qui n’atteint pas les étages inférieurs de l’écosystème, réduisant les ressources florales pour certains types de pollinisateurs. Mais les arbres fournissent néanmoins une possibilité de nidifications et quelques ressources florales au début du printemps. Il apparaît donc que les facteurs paysagers ont un rôle plus complexe dans le soutien d’un population d’abeilles, notamment guidé par la disponibilité des ressources florales. Plus la diversité au niveau des essences floristiques est grande, plus cette communauté végétale peut fournir des ressources florales sur le long terme dans la saison et donc répondre aux besoins d’une communauté de pollinisateurs. Cette dernière peut se maintenir plus longtemps et est potentiellement plus riche en terme de diversité.
Une zone urbaine comprend des terres végétalisées publiques mais aussi des espaces verts privés comme les cours et les jardins. Aucune étude encore ne prend en compet ce genre d’espace dans l’étude des populations d’abeilles, alors même que beaucoup de jardiniers privés s’intéressent aux plantations soutenant la survie des abeilles.
Site d’étude
Wikipedia
Dans la ville d’Ottawa en Ontario, 380 adresses, ayant toutes plus de 50% d’espaces verts, et n’autorisant aucune utilisation de pesticides ont été présélectionnées, sur la base du volontariat des propriétaires. Les sites finaux ont été sélectionnés pour être distants d’au moins un kilomètre. Au total, 27 sites ont été sélectionnés. La plupart étaient dominés par une pelouse bordée de jardins ; d’autres contenaient des plates-bandes plantées.
Résultats
La variation dans l’abondance et la diversité des abeilles n’a pu être expliquée par le simple fait que les zones étaient plus ou moins urbanisées. En d’autres termes, la quantité de construction ne peut être directement liée de manière linéaire au déclin des abeilles. L’un des facteurs ayant montré le plus grand impact pour expliquer l’état populationnel des abeilles est la richesse et l’abondance florale des sites étudiés, ce qui va avoir des implications pour la gestion des terres urbaines pour les abeilles.
Il est possible que l’effet de la canopée sur l’abondance et la diversité des abeilles, le plus souvent examinés en forêt, diffère dans les paysages urbains. De nombreuses espèces d’abeilles préfèrent les paysages qui imitent les forêts de succession précoce, c’est-à-dire au couvert végétal clairsemé soutenant souvent plus de ressources florales qu’un sol forestier fortement couvert.
On ne peut pas nier le fait, en autres, que la composition urbaine en espèces d’arbres n’est généralement pas représentative des forêts naturelles et a tendance à inclure davantage d’espèces ornementales qui peuvent fournir des ressources florales supplémentaires aux communautés d’abeilles.
Cette étude permet, prise avec d’autres, de définir les aspects des paysages urbains les plus accueillants pour les abeilles, qui sont des butineuses centrales, c’est-à-dire que les ressources dont elles ont besoin, y compris l’habitat de nidification et les réserves de nourriture, doivent se trouver à distance de vol.
De plus, certaines espèces d’abeilles se spécialisent sur une seule espèce ou famille de plantes. Ainsi les sites qui offrent un large éventail de ressources en pollen peuvent abriter une communauté d’abeilles plus abondante et plus riche en espèces. Cette étude relate néanmoins un pourcentage non expliqué de variations dans l’abondance des abeilles à travers les sites étudiés. Ils supposent que l’aptitude à la nidification pourrait en être l’origine et nécessite de plus amples études.
Conclusion
Au-delà de la structuration des paysages entre une prairie et une zone urbaine, les abeilles sont dans les deux cas beaucoup plus sensibles à la variété et la richesse des plantes à fleurs que le pourcentage de bâtit. Cette diversité floristique soutient des communautés riche et diversifiés d’abeilles. C’est donc des programmes de re-végétalisation, de bandes fleuries, de cours résidentielles sans pesticides mais avec des essences de plantes et d’arbres ornementaux à fleurs qui pourraient avoir un impact plus que positif dans la survie de nos abeilles si précieuses pour notre survie…
Qu’elle soit de la campagne ou de la ville, une abeille appréciera donc toujours la multitude des fleurs à proximité de sa ruche !
Eden E. Gerner, Risa D. Sargent, Local plant richness predicts bee abundance and diversity in a study of urban residential yards., Basic and Applied Ecology, 2021, ISSN 1439-1791, https://doi.org/10.1016/j.baae.2021.11.004